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AnalyseHuit provinces dans le rouge : les déficits grimpent presque partout au pays

Les provinces et territoires ont un déficit total de près de 30 milliards de dollars.

Le premier ministre Doug Ford parcourt les pages du budget en Chambre, à Queen's Park, aux côtés du ministre Vic Fedeli.

Huit provinces sont dans le rouge. Seuls le Nouveau-Brunswick et l'Alberta ont présenté des budgets excédentaires.

Photo : Radio-Canada / Evan Mitsui

La saison des budgets tire à sa fin. Les soldes budgétaires se sont détériorés presque partout au pays. Les provinces ont un déficit total de près de 30 milliards de dollars. Mais la situation n’est peut-être pas aussi alarmante qu’elle en a l’air, selon un rapport du Mouvement Desjardins.

Dans plusieurs cas, on a eu de mauvaises surprises : les déficits annoncés dans certaines provinces, comme le Québec, l’Ontario et la Colombie-Britannique, sont bien au-delà de ceux qui étaient prévus l’an dernier, ou même à l’automne.

Seuls le Nouveau-Brunswick et l'Alberta enregistrent des excédents budgétaires. Mais même dans le cas du budget albertain, le surplus projeté est bien plus petit que celui des dernières années.

Toutefois, pour éviter de comparer des pommes avec des oranges, il faut évaluer les budgets des provinces en fonction de la taille de leur économie. C’est plus important de regarder les déficits et la dette comme pourcentage du PIB, dit Marc Desormeaux, économiste principal chez Desjardins.

Lorsque la population grandit, l'économie grandit. C'est naturel que le secteur public [soit] aussi [appelé à] grandir.

Une citation de Marc Desormeaux, économiste principal chez Desjardins

Par rapport au PIB, aucune province n’anticipe de déficit record au cours de la prochaine année budgétaire.

C'est ça qui est le plus important : les déficits combinés des 10 provinces sont [plus] cohérents avec la période de faible croissance des années 2010 qu’[avec les] récessions des années 80 ou 90, par exemple, précise l’économiste.

Même si la dette des provinces pourrait croître plus rapidement que leurs économies combinées, ce rapport de la dette nette au PIB reste inférieur à ce qu’il était pendant la majeure partie de la décennie qui a précédé la pandémie de COVID-19.

Les gouvernements de l'Alberta et du Nouveau-Brunswick prévoient une importante diminution de leur ratio dette-PIB au cours des prochaines années, alors qu’il se stabilisera autour des 40 % en Ontario et au Québec, les deux plus grandes provinces au pays.

En Colombie-Britannique, le fardeau de la dette va presque doubler par rapport à son niveau prépandémique. Le ratio dette-PIB dans cette province était d’environ 15 % en 2019. Il bondira à près de 28 % en 2027, selon les prévisions du gouvernement néo-démocrate de David Eby.

Les provinces ont les mains liées, selon des experts

D'après M. Desormeaux, les provinces n’avaient en quelque sorte pas d'autre choix que d’augmenter leurs dépenses, face à une croissance démographique qui met beaucoup de pression sur les services publics.

L’Alberta, par exemple, a dû composer avec une croissance record de la population l’an dernier. La province prévoit encore une hausse de 3,7 % cette année, ce qui continuera de créer des besoins dans tous les secteurs.

Le vieillissement de la population entraîne aussi des pressions importantes, notamment dans les soins de longue durée. Prenez l’exemple du Québec : les résidents de 75 ans et plus représentaient 2,3 % de la population en 1971. Cette proportion grimpera à presque 16 % en 2041, selon la province.

Il fallait aussi augmenter les salaires des travailleurs du secteur public, qui voyaient leur pouvoir d’achat s’éroder avec l’inflation. L’Ontario, par exemple, aura à leur verser plus de 6 milliards de dollars, après avoir plafonné à 1 % leurs hausses annuelles, une mesure qui a été jugée inconstitutionnelle.

Cependant, dans la plupart des provinces, la hausse des dépenses est inférieure à la somme du taux d’inflation et du taux de croissance de la population.

Pour le gouvernement conservateur de Danielle Smith, en Alberta, il s’agit d’une preuve d'une saine gestion financière. Ce calcul de croissance de la population et de l’inflation a toujours été un plafond, pas un plancher, a affirmé le ministre albertain des Finances, Nate Horner. Nous dépensons là où nous pouvons.

Les contribuables, eux, pourraient voir les choses autrement. Même si elles augmentent en termes absolus, les dépenses par habitant diminuent en valeur réelle, ce qui peut mener à une dégradation de la qualité des services.

On commence à se rendre compte qu'il faut rattraper plusieurs années de retard et on ne peut pas le faire en une seule année.

Une citation de Geneviève Tellier, professeure à l’École d’études politiques de l'Université d’Ottawa

On n'aura certainement pas le niveau de services auquel on penserait avoir le droit parce que justement il y a de l'inflation. On ne peut pas absorber une hausse importante des dépenses quand les revenus ne sont pas au rendez-vous, ce qui est le cas actuellement, explique la politologue Geneviève Tellier, de l’Université d’Ottawa.

La politologue regarde la caméra.

Geneviève Tellier, politologue à l’Université d’Ottawa (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Rozenn Nicolle

Des recettes fiscales qui stagnent

Pendant ce temps, les revenus ne suivent pas les dépenses. Les prévisions économiques pour la prochaine année s’assombrissent, ce qui influence à la baisse les impôts tirés des entreprises et des particuliers.

Nous croyons que l’économie canadienne n’a pas encore ressenti toutes les répercussions des hausses de taux d’intérêt vigoureuses amorcées il y a deux ans, souligne le rapport de Desjardins.

Les restrictions visant les admissions de résidents non permanents récemment annoncées par le gouvernement fédéral ne font que renforcer cette opinion.

Une augmentation des impôts sur le revenu pourrait aider les provinces à combler leur déficit budgétaire. Cette option, très peu populaire lorsque les choses vont bien, l’est encore moins lorsque beaucoup de familles peinent à joindre les deux bouts.

Le gouvernement fédéral, pour sa part, promet certaines mesures pour aider les Canadiens, comme une couverture d’assurance médicaments et un programme d’alimentation dans les écoles. La ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, déposera son budget le 16 avril prochain.

Chrystia Freeland écarte les mains en parlant lors d'une conférence de presse.

La ministre fédérale des Finances, Chrystia Freeland, présentera son prochain budget le 16 avril.

Photo : La Presse canadienne / Patrick Doyle

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