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AnalysePaul St-Pierre Plamondon joue le tout pour le tout

Le discours du chef péquiste consolide le changement de paradigme amorcé au sein du PQ depuis son élection.

Catherine Gentilcore, Émile Simard et d'autres membres du PQ entourant Paul St-Pierre Plamondon l'applaudissent, certains brandissant des petits drapeaux du Québec.

Paul St-Pierre Plamondon entouré de la présidente du PQ, Catherine Gentilcore, et du président du Comité national des jeunes du Parti québécois, Émile Simard.

Photo : La Presse canadienne / Jacques Boissinot

Paul St-Pierre Plamondon a eu beau répéter sur tous les tons qu’il ne reculerait pas sur son engagement à tenir un nouveau référendum, des doutes persistent. Après le discours qu’il a prononcé cette fin de semaine, ce scénario devient toutefois carrément impensable.

Il y a longtemps qu’on avait entendu des déclarations aussi peu équivoques de la part d’un chef péquiste : si le Québec ne devient pas rapidement un pays, dit-il, il risque carrément de disparaître. Non seulement la tenue d’un nouveau référendum est pour lui inéluctable, mais il s’agira vraisemblablement du référendum de la dernière chance.

Soit on garde le statut de minorité en déclin dans le Canada jusqu’à notre disparition, soit on devient enfin majoritaires chez nous avec la garantie d’une pérennité linguistique et culturelle, a-t-il asséné brutalement.

À ses yeux, les intrusions répétées du gouvernement Trudeau dans les champs de compétence provinciale sont révélatrices des réels objectifs des pouvoirs fédéraux : On est en train de tomber dans un régime qui n’est plus une fédération, mais un État de plus en plus unitaire dans le cadre duquel notre poids politique sera de moins du cinquième des voix. On est cuits.

En d’autres mots, « PSPP » continue de faire monter les enchères. Le changement de paradigme, amorcé depuis qu’il s’est hissé à la tête du PQ, n’en est pas moins remarquable. Depuis la défaite de 1995, on a reproché au parti d’être prêt à tout pour conquérir le pouvoir, y compris à mettre son option en veilleuse. Aujourd’hui, le PQ mise tout ce qu’il a sur elle.

Ces déclarations provoqueront inévitablement des réactions aussi vives que polarisées. Si elles sont susceptibles de réveiller les instincts de survie de certains nationalistes endormis, elles risquent aussi de refroidir tous ceux que les discours sur le déclin du Québec irritent. C’est sans compter qu’il s’agit de tout un pari sur le plan électoral. Le Parti québécois a le vent dans les voiles, mais sa popularité tient d’abord à la déroute de la CAQ.

Paul St-Pierre Plamondon se dit avant tout réaliste, mais les électeurs pourraient trouver qu’un propos si sombre ne cadre pas bien avec l’image optimiste et rafraîchissante qui a fait son succès jusqu’ici. Le poids démographique du Québec est certes en recul dans le Canada, mais tous les Québécois ne croient pas pour autant que le gouvernement fédéral s’affaire activement à écraser ceux qui refusent de s’assimiler.

Après avoir passé des années à reprocher au PQ de cacher son option, le Parti libéral du Québec accuse maintenant Paul St-Pierre Plamondon d’être de loin le chef du Parti québécois le plus radical de son histoire.

Les paris inverses de la CAQ et du PQ

Depuis la dégelée qu’il a connue en 2018, le PQ est revenu à sa raison d’être : l’indépendance. C’est en mettant l’accent sur son objectif cardinal qu’il a su garder ses militants mobilisés et attirer vers lui de nouveaux appuis.

Les électeurs qui disent maintenant vouloir appuyer le Parti québécois ne sont en revanche pas nécessairement tous convaincus du bien-fondé de la tenue d’un référendum rapide, ni même de la souveraineté elle-même, comme le démontrent les plus récents sondages. Le risque de dérapage, lors des prochaines élections, est donc bien réel. En 2014, l’entrée en scène de Pierre Karl Péladeau et son engagement en faveur de la souveraineté, le poing levé, avaient complètement fait dérailler la campagne électorale de Pauline Marois.

Dans l’entourage de François Legault, on fait le pari que l’avance du PQ fondra comme neige au soleil lorsqu’au prochain scrutin, les électeurs se rendront compte de la possibilité réelle qu’il y ait un nouveau référendum. La CAQ fait le calcul que le PQ devra soit reculer sur sa promesse, auquel cas il perdra toute crédibilité, soit maintenir le cap, ce qui entraînera inévitablement sa chute. Si le discours de Paul St-Pierre Plamondon écarte définitivement la première hypothèse, la deuxième demeure néanmoins plausible.

François Legault fait valoir un point, lors d'une conférence de presse.

Le premier ministre du Québec François Legault, en conférence de presse le mardi 9 avril 2024

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy Roussel

Or, c’est précisément ce second scénario que le discours du chef péquiste vise à contrer. Non seulement veut-il préparer le terrain pour éviter que l’enjeu référendaire n’arrive comme un cheveu sur la soupe lors du prochain scrutin, mais Paul St-Pierre Plamondon campe d’ores et déjà les contours de la prochaine campagne électorale, comme s’il s’agissait d’une campagne référendaire. Il évoque la nécessité pour tous les souverainistes de former une coalition, courtisant du même souffle les électeurs de Québec solidaire comme ceux du Parti conservateur du Québec.

Il est vrai que le PQ a tout intérêt à dédramatiser le déclenchement d’un nouveau référendum, en le présentant comme acquis et inévitable. L’idéal serait, pour lui, que le débat des prochaines années ne porte pas tant sur la tenue d'une telle consultation que sur les bienfaits de la souveraineté elle-même.

L’électorat se divisant maintenant en cinq grands partis, il est possible de former un gouvernement majoritaire avec moins de 38 % des suffrages, comme la CAQ l’a démontré en 2018. Il faudra toutefois plus qu’une campagne de publicité sur l’indépendance ou qu’un livre bleu sur le Québec souverain pour susciter l’intérêt d’une majorité de citoyens. Nombre d’entre eux considèrent la question réglée et ne veulent plus en entendre parler.

Depuis que le Parti québécois est passé en première position dans les intentions de vote, François Legault répète que la cause est entendue, que les Québécois ne veulent pas de référendum. Paul St-Pierre Plamondon croit au contraire que l’histoire, par définition, ne s’écrit jamais d’avance et que la population pourrait changer d’idée. Ce faisant, il ne se ménage toutefois aucune porte de sortie, ni avant, ni pendant, ni après les prochaines élections.

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