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Mort de deux pompiers : Saint-Urbain mise à l’amende par la CNESST

Une personne descend en rappel d'un hélicoptère de la Sûreté du Québec.

Une équipe de recherche dans le secteur où un corps a été découvert le long de la rivière du Gouffre, le 3 mai. Un rapport de la CNESST a conclu que Régis Lavoie et Christopher Lavoie n'avaient ni la formation, ni les compétences, ni l'équipement nécessaires pour réaliser des sauvetages nautiques, ce qui les a mis en danger.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy-Roussel

La Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) a donné un constat d'infraction à la Municipalité de Saint-Urbain pour le rôle qu'elle a joué dans le décès de deux de ses pompiers volontaires lors des inondations du 1er mai 2023.

La CNESST avait un an pour entamer des démarches. Elle aura finalement presque épuisé le délai. Elle a mis la Municipalité à l'amende le 26 avril pour les événements survenus il y a un an.

L'organisme considère que Saint-Urbain a contrevenu à la loi ou a agi de façon à compromettre la santé et la sécurité des travailleurs. C’est un juge de la Cour du Québec qui sera appelé à trancher en cas de contestation de l’amende ou de l’infraction, indique la CNESST.

Une femme parle dans un micro devant la caserne de pompiers.

Claudette Simard, mairesse de Saint-Urbain, lors d'une cérémonie en mémoire des pompiers. (Photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Camille Carpentier

Une municipalité s'expose à une amende pouvant aller jusqu'à 77 000 $ lors d'une première offense. Celle-ci peut aller jusqu'à 300 000 $ en cas de récidive.

La Municipalité a 30 jours pour enregistrer un plaidoyer de culpabilité ou de non-culpabilité.

Radio-Canada a été en mesure de confirmer l'identité des deux pompiers volontaires disparus dans Charlevoix : Christopher Lavoie, 23 ans, et Régis Lavoie, 55 ans.

Christopher Lavoie, 23 ans, et Régis Lavoie, 55 ans

Photo : Facebook

Manquements

Rappelons que l'organisme a conclu à la fin de mars que Régis Lavoie et Christopher Lavoie n'avaient ni la formation, ni les compétences, ni l'équipement nécessaires pour réaliser des sauvetages nautiques, ce qui les a mis en danger de noyade.

Le 1er mai 2023, Régis et Christopher Lavoie ont mis à l'eau un véhicule de type Argo, une embarcation mal adaptée pour mener une opération de sauvetage à proximité de la rivière du Gouffre. La gestion de l'intervention, tant au niveau de la Municipalité que du service incendie, a comporté des lacunes qui ont mené à la mise à l'eau du véhicule, a conclu la CNESST.

Une maison complètement encerclée d'eau.

Le 1er mai, Régis et Christopher Lavoie ont tenté de rejoindre une maison en traversant un champ complètement inondé par le débordement de la rivière du Gouffre. Ils n'ont jamais été en mesure de s'y rendre.

Photo : Bureau du coroner

Le rapport précise aussi que la Municipalité n’avait aucun plan spécifique pour dicter les interventions en cas d’inondations, même si la région en subit chaque année.

Habits de combat

L'enquête publique du coroner sur le décès des deux pompiers s'est poursuivie mardi pour une cinquième journée d'audience avec le témoignage des auteurs du rapport de la CNESST.

Ils ont insisté sur une partie de leur rapport moins médiatisée, qui concerne les habits de combat des pompiers.

Des habits de pompiers accrochés au mur.

Lorsqu'ils ont sombré, les pompiers portaient leurs habits de combat. Ce genre d'équipement n'est pas adapté à du sauvetage nautique, note la CNESST.

Photo : Radio-Canada / Zacharie Routhier

Même si la CNESST conclut qu'il ne s'agit pas de la cause des décès, Caroline Pelchat et François Lachance conviennent que Régis et Christopher Lavoie ont considérablement diminué leurs chances de survie lorsqu'ils ont décidé de se mettre à l'eau sans veste de flottaison et en habit de pompier, le jour fatidique. Deux vestes étaient pourtant accessibles dans leur embarcation.

La CNESST a mené des tests dans des piscines avec des pompiers professionnels. Leurs résultats sont sans équivoque.

Un pompier vêtu d'un habit de combat d'incendie coule, peu importe la position dans l'eau, a mentionné Caroline Pelchat, inspectrice pour la CNESST. Les tests concluent également qu'il est impossible de se hisser hors de l'eau avec un tel habit sans l'aide d'un confrère, de sorte qu'au moment où il tombe à l'eau, le pompier devient une victime à secourir plutôt qu'un sauveteur.

Rappelons que la CNESST n'a pas retenu cette cause dans les décès des deux pompiers volontaires. Elle pointe plutôt le manque de formation et d'équipement approprié, de même que l'absence de mesures de prévention mises en place en cas d'inondations.

Peu de chances de survie, même avec une veste de flottaison

Les tests ont démontré également qu'il est difficile, mais pas impossible, de flotter avec un habit de combat si l'on porte une veste de flottaison.

Montage de deux vestes de sauvetage pleines de boue.

Deux vestes de sauvetage ont été retrouvées au fond de la rivière.

Photo : CNESST

Or, la journée du 1er mai, en raison du débit de l'eau dans la rivière, le port d'une telle veste n'aurait pas permis de sauver les pompiers. À 308 mètres cubes par seconde de débit, on peut se poser la question de savoir si la veste de flottaison aurait été pertinente dans ce cas-là a laissé tomber Mme Pelchat.

Il ne fallait pas y aller.

Une citation de Caroline Pelchat, inspectrice pour la CNESST

Un véhicule mal adapté dans une rivière déchaînée

Un spécialiste des véhicules amphibies Argo est venu répondre à plusieurs questions, sachant que Régis Lavoie avait emprunté le véhicule de sa sœur, qui était équipé de chenillettes. Un moteur hors-bord avait aussi été utilisé par les pompiers volontaires.

Un véhicule se trouve sous des décombres dans la rivière.

Le véhicule Argo utilisé par les pompiers a été retrouvé plusieurs mois après les événements. Il aura fallu près de six heures pour l'extirper des débris.

Photo : Bureau du coroner du Québec

Pour Patrick Gauthier, vice-président du magasin Les Tout-Terrains Argo PG, tout était en place pour qu'un incident arrive. Si on utilise un Argo dans l'eau, il ne faut vraiment pas aller où il y a du courant, a laissé tomber le spécialiste. Tout équipement ajouté, notamment des chenilles, rend encore plus difficile la navigation de l'appareil. Les chenilles annulent complètement la conduite dans l’eau. Des débris peuvent faire chavirer le véhicule s'il est poussé par un certain débit, a expliqué l'expert.

Il a été impossible de mener une expertise du véhicule en raison de son état de dégradation.

Il a été impossible de mener une expertise du véhicule en raison de son état de dégradation.

Photo : Bureau du coroner du Québec

Philippe Bourdon, géographe-consultant pour la Ville de Baie-Saint-Paul, a aussi démontré à la coroner le caractère historique des inondations de 2023. À certains moments, le débit de la rivière du Gouffre a atteint 500 mètres cubes par seconde. Normalement, une crue printanière se situe davantage autour de 70 m3/s. Selon lui, ce genre de crue arrive environ une fois par siècle.

Effondrement partiel d’un pont qui permet en temps normal d’enjamber la rivière du Gouffre sur un chemin forestier.

Des dégâts considérables ont été constatés dans le secteur de Saint-Urbain, le long de la rivière du Gouffre et de ses affluents, dont celui baptisé Le Gros Bras (photo).

Photo : Radio-Canada / Louis Martineau

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