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Des revendications sous la houlette d'Ottawa

Frank Calder, leader Nisga'a et ministre provincial, rencontre le ministre canadien des Affaires indiennes Jean Chrétien et le premier ministre canadien Pierre Trudeau à Ottawa, le 7 février 1973. Suite au jugement Calder, Ottawa instaure une politique pour régler des revendications autochtones.

Frank Calder, leader Nisga'a et ministre provincial, rencontre le ministre canadien des Affaires indiennes Jean Chrétien et le premier ministre canadien Pierre Trudeau à Ottawa, le 7 février 1973. Suite au jugement Calder, Ottawa instaure une politique pour régler des revendications autochtones.

Photo : La Presse canadienne

Radio-Canada

En 1969, le livre blanc sur la politique indienne publié par le gouvernement de Pierre Elliott Trudeau provoque un tollé chez les Premières Nations. Ces dernières s'affirment en tant que nations souveraines et dénoncent la volonté du gouvernement d'éteindre leurs droits issus de traités.

En 1973, Pierre Elliott Trudeau admet son erreur, et son gouvernement instaure une nouvelle politique pour le règlement des revendications autochtones. Le jugement Calder de la Cour suprême vient d'ailleurs de reconnaître que les Premières Nations ont des droits sur le territoire du seul fait qu'elles l'ont occupé depuis des temps immémoriaux.

Cette politique comporte deux volets :

  • celui des revendications globales, qui concernent les nations qui n'ont jamais signé de traité;
  • celui des revendications particulières, qui visent à corriger des erreurs historiques, liées aux traités ou aux responsabilités du gouvernement face aux Autochtones.

Les revendications globales

La création du territoire du Nunavut en 1999 est l'aboutissement d'un processus de revendications globales enclenché dans les années 1970.

La création du territoire du Nunavut en 1999 est l'aboutissement d'un processus de revendications globales enclenché dans les années 1970.

Photo : La Presse canadienne / Tom Hanson

Terres autochtones en vue

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À l'époque où cette politique est instaurée, de vastes régions du territoire canadien n'ont fait l'objet d'aucun traité avec les peuples autochtones qui y vivent. C'est le cas de presque tout le territoire de la Colombie-Britannique, de la majeure partie des territoires du Nord, des provinces de l'Atlantique et du Québec.

Le gouvernement fédéral veut maintenant négocier des traités modernes avec les communautés qui habitent ces régions. Les nouveaux traités portent notamment sur la propriété foncière, les droits de pêche et de chasse, la participation à la gestion des terres et des ressources, l'indemnisation, le partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources et le développement économique.

Dans plusieurs cas, le règlement comprend une entente sur l'autonomie gouvernementale du groupe autochtone.

« L'avantage des traités, pour les Premières Nations, c'est d'obtenir la certitude sur l'assise territoriale et sur la gouvernance. C'est une façon de s'assurer que les Premières Nations sont équitablement représentées dans la croissance du pays », affirme Sophie Pierre, commissaire en chef de la Commission des traités de la Colombie-Britannique et ex-chef de la St. Mary's Indian Band.

Pour les gouvernements fédéral et provinciaux, la notion de certitude vise à savoir précisément qui est propriétaire du territoire et peut l'exploiter. Pendant longtemps, les gouvernements ont demandé aux Premières Nations de renoncer formellement à leurs droits, sauf ceux qui étaient mentionnés dans les traités, afin d'obtenir cette certitude. Depuis 1986, devant l'opposition des groupes autochtones, on a renoncé à cette exigence.

Ainsi, selon l'entente de principe qu'ils ont signée, les Innus du Québec conserveront leurs droits ancestraux, mais en suspendront l'exercice, sauf pour ceux qui sont mentionnés explicitement dans le traité. De plus, il est prévu que le traité sera réexaminé périodiquement. (Voir la section « Vers un traité innu » dans la page « Des communautés en marche »).

Les critères pour présenter une revendication

C'est le gouvernement fédéral qui détermine si une revendication globale est admissible ou non, selon certains critères. Par exemple, la Première Nation doit démontrer qu'elle formait une société structurée qui utilisait ce territoire au moment où les Européens ont affirmé y être souverains. L'utilisation traditionnelle du territoire doit s'être poursuivie jusqu'à ce jour.

« Au Québec, pour ce qui est des Hurons, des Abénaquis et des Mohawks, la raison pour laquelle il n'y aura pas de négociation globale, c'est que selon le Québec et le Canada, ils n'ont pas occupé le territoire qu'ils occupent aujourd'hui de façon continue », explique l'anthropologue Pierre Trudel, spécialiste des questions autochtones, qui précise que ces nations peuvent toutefois avoir des droits d'usage sur le territoire.

« Les Abénaquis ont une saison de chasse différente sur les terres de la Couronne au sud du fleuve Saint-Laurent. Ce sont des droits ancestraux d'usage qui résultent du fait qu'ils sont Autochtones et qu'ils ont eu un usage historique du sud du Saint-Laurent », explique-t-il.

Les étapes des négociations

Le processus des revendications globales compte six étapes et s'étend sur plusieurs années.

  1. Dépôt de la revendication : le groupe autochtone prépare sa demande et l'accompagne de documents à l'appui.
  2. Recevabilité : après analyse, le gouvernement canadien décide si la revendication fera l'objet de négociations.
  3. Accord-cadre : les gouvernements fédéral et provincial ou territorial ainsi que le groupe autochtone déterminent les sujets à débattre en vue d'un règlement.
  4. Entente de principe : les parties s'entendent sur le fond des questions qui seront abordées dans l'entente définitive. Elles planifient aussi la mise en oeuvre de l'entente.
  5. Entente définitive et ratification : le gouvernement du Canada, en consultation avec des experts, s'assure que les préoccupations d'ordre juridique, économique, environnemental et social, entre autres, sont cernées avec justesse. L'entente définitive ratifiée par les trois parties, c'est-à-dire le traité, reçoit une protection constitutionnelle.
  6. Mise en oeuvre : cette étape comprend la rédaction juridique, la délivrance de titres fonciers et l'exécution des différentes clauses (voir la carte interactive, qui montre l'état des revendications qui ont été jugées recevables).

Et les provinces?

De nombreuses Premières Nations hésitent à signer des ententes avec les gouvernements provinciaux.

« Ce n'est pas nécessairement que les Premières Nations préfèrent le gouvernement fédéral aux gouvernements provinciaux, explique Renée Dupuis, juriste spécialisée en droit autochtone qui a été présidente de la Commission des revendications particulières des Indiens. Mais ce que les Premières Nations ont très bien compris, c'est qu'il y a une obligation constitutionnelle dont le gouvernement fédéral ne peut pas se départir de sa seule initiative et de sa seule volonté. [Elles disent] : Faisons des accords pour délimiter notre droit inhérent à nous gouverner plutôt que de voir le fédéral se départir de son autorité au profit des provinces. »

Dans les provinces des Prairies, la réticence à traiter avec les provinces est encore plus marquée. En effet, les Premières Nations y ont signé des traités avec la Couronne britannique avant même que ces provinces ne soient créées. Or, en 1930, le fédéral a transféré au Manitoba, à la Saskatchewan et à l'Alberta les pouvoirs sur des terres et des ressources naturelles que les Autochtones affirment n'avoir jamais cédées.

Cette absence de lien naturel n'a pas empêché les Cris et le gouvernement du Québec de signer la Paix des Braves en 2002. Il s'agissait d'une entente politique et économique de nation à nation dans le but de faciliter le développement économique dans la région de la baie James. Plus précisément, l'entente a permis à Hydro-Québec de construire le projet hydroélectrique Eastmain-Rupert.

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