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L'alimentation peut-elle aider à remonter le moral ? | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier

Avec son manque de luminosité et ses journées grises et froides, cette période de l’année, au creux de l’hiver, devient facilement déprimante pour de nombreuses personnes. D’ailleurs, le troisième lundi du mois de janvier, serait le jour le plus déprimant de l’année, le « Blue Monday » (selon une théorie qui n'a rien de scientifique)(Nouvelle fenêtre). L’alimentation peut-elle aider les gens à avoir un meilleur moral et à mieux passer à travers ces mois difficiles? On fait le point. 

Environ 15 % de la population canadienne peut ressentir des symptômes légers de dépression saisonnière chaque année, selon l’Association canadienne pour la santé mentale : tristesse, baisse de la motivation, fatigue persistante, envie de trop dormir, entre autres. Certaines personnes ont alors tendance à chercher du réconfort dans des aliments riches en gras et en sucre.

Ces aliments sont souvent associés à une émotion de grand plaisir et de récompense , explique Mélanie Massé, nutritionniste et coordonnatrice professionnelle en nutrition clinique à l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal.

« Ils peuvent devenir une manière rapide de se remonter le moral et même de se procurer un effet calmant. [...] L’effet est instantané, mais il se dissipe très rapidement, il faut donc constamment recommencer à manger ce type d’aliments pour ressentir quelques minutes de bonheur.  »

— Une citation de  Mélanie Massé, nutritionniste

Et c’est ainsi qu’on va augmenter la sécrétion de dopamine, qu’on appelle aussi hormone du bonheur ou du plaisir : C’est le système de récompense du cerveau qui va être stimulé par ces aliments, un peu comme l’effet de l’ingestion d’alcool ou de drogues psychoactives , détaille Stephanie Fulton, chercheuse et professeure titulaire au Département de nutrition de la Faculté de médecine de l’Université de Montréal.

Le problème, c’est que consommer des aliments transformés ou riches en gras ou en sucre en trop grande quantité peut mener à des carences nutritionnelles et avoir des effets néfastes sur le microbiote intestinal. Résultat : on va accentuer notre mal-être, selon Mélanie Massé.

Véronique, 50 ans, agente de bureau du gouvernement, peut en témoigner:

« Ça m’arrivait [souvent] d’avoir envie d’une grosse poutine parce que je me sentais seule un vendredi ou un samedi soir, ou par exemple de manger un sac d’amandes au chocolat au complet.  »

— Une citation de  Véronique

Après, je ressentais énormément de culpabilité, et ça devenait un cercle vicieux. L’alimentation était une soupape pour gérer mes émotions. Ses consultations en nutrition l’ont aidée à sortir de ce cercle vicieux. 

L’aliment comme médicament?

Si l’on veut améliorer son alimentation dans le but de donner un coup de pouce à sa santé mentale, mieux vaut ne pas exclure des aliments de son régime ni chercher à les catégoriser bons ou mauvais . La perfection alimentaire n’est pas un but en soi , souligne Mélanie Massé.

Le plus important est de viser une très grande variété alimentaire, qui est nécessaire pour éviter qu'il y ait des carences en nutriments et pour [avoir] un microbiote intestinal en santé.

Betteraves braisées à l’orange
Betteraves braisées à l’orange  | Photo : Ricardo cuisine / Sophie Carrière

Pour ce qui est des légumes, privilégiez les couleurs foncées. Ça peut sembler simpliste, mais souvent, plus le légume est foncé, plus il est bon pour la santé, affirme Stephanie Fulton. Les betteraves, les épinards, tous les légumes vert foncé sont des aliments riches en vitamines et minéraux.

Et n’oubliez pas les acides gras oméga-3, qui ont des bénéfices démontrés sur la santé physique en général, mais aussi sur la santé mentale.

« Les oméga-3 [de type EPA, ou AEP en anglais, qu’on trouve dans l’huile de poisson] ont des effets bénéfiques sur l’humeur en raison de leur effet anti-inflammatoire. On a pu démontrer qu’ils ont un effet antidépresseur modéré chez l’humain.  »

— Une citation de  Stephanie Fulton, chercheuse

C’est le bon moment pour intégrer dans sa diète des aliments riches en oméga-3 d’origine marine, notamment les poissons gras comme le saumon ou le maquereau, selon Mélanie Massé. On peut aussi opter pour des suppléments, en suivant l’avis d’une professionnelle ou d’un professionnel de la santé.

Recette de pavés de saumon grillé, émulsion de champignons à l'huile d'amande
Recette de pavés de saumon grillé, émulsion de champignons à l'huile d'amande | Photo : iStock / gbh007

La nutritionniste insiste sur l’importance de maintenir un équilibre entre son apport en oméga-3 et en oméga-6, qu’on trouve dans les huiles végétales, donc dans plusieurs aliments frits ou transformés, et dans les viandes. C’est ce qui expliquerait, en partie, les bénéfices pour la santé mentale de la diète méditerranéenne, riche en oméga-3, par rapport à l’alimentation nord-américaine typique, centrée sur la viande.

On doit travailler sur nos habitudes alimentaires quotidiennes, se demander comment on peut faire plus de place aux aliments riches en oméga-3 et comment, à l’inverse, réduire la place des aliments riches en oméga-6.

En consommant des fruits et des légumes, des aliments riches en fibres et des protéines, et en limitant les aliments transformés, on met aussi les chances de son côté.

Aux fourneaux!

Recette de pâtes aux tomates et au pesto
Recette de pâtes aux tomates et au pesto | Photo : O'Gleman Média / Maude Chauvin

Chaque petit geste compte pour améliorer ses habitudes alimentaires. Il n’y a pas un aliment précis, un aliment miraculeux qui va venir changer la vie de la personne , rappelle Mélanie Massé. 

Le simple fait de cuisiner davantage à la maison et de manger moins au restaurant est une réussite.

L’hiver, les symptômes de dépression saisonnière peuvent nous faire perdre l’envie de cuisiner, et les fruits et légumes frais sont bien évidemment moins accessibles.

On doit y aller avec des petits objectifs, car l’erreur est souvent de vouloir s’embarquer dans un grand chantier où, du jour au lendemain, on va changer drastiquement nos habitudes. [...] On va vraiment perpétuer une habitude seulement si le plaisir est au rendez-vous.

 On peut y aller doucement, en commençant par des recettes faciles. Au-delà de l’alimentation, ça donne une grande fierté de préparer un bon lunch, un bon souper, ou de réussir une bonne recette , confirme sa patiente Véronique.

Bien entendu, si l’on souffre de dépression sévère, l’alimentation ne sera pas suffisante pour remonter la pente et c’est la consultation auprès de spécialistes de la santé qui est recommandée. 

L'alimentation peut-elle aider à remonter le moral ? | Photo : Radio-Canada / Ariane Pelletier